Le champ de bataille a toujours été un lieu où règne le chaos. L’affrontement des forces militaires opposantes est une entreprise complexe et de taille. Il est ainsi essentiel de connaître en temps réel où se trouvent ses troupes, afin de les diriger aussi rapidement et précisément que possible contre l’ennemi. Le plus souvent, ceux qui y parviennent le mieux en ressortent les vainqueurs.
La connaissance situationnelle est incontournable à la réussite de toute opération militaire. Il y a quelques décennies, on ne pouvait pleinement connaître une situation particulière en temps réel que par des transmissions radio. Le processus était réalisable, mais devenait difficile lorsque les unités étaient hors de portée ou sinon incapables de fournir des rapports de situation (SITREP).
Sans connaître en temps réel l’emplacement de leurs unités, les commandants risquent de prendre des décisions susceptibles de donner un avantage à l’ennemi. En outre, les ressources peuvent être affectées aux mauvaises grilles , les tirs d’artillerie et l’appui aérien rapproché peuvent être fournis là où ils sont inefficaces et, dans certains cas, la dégradation de la connaissance de la situation peut entraîner un fratricide.
Or, la technologie a rendu la connaissance situationnelle en temps réel beaucoup plus réalisable sur le champ de bataille moderne. Grâce aux radios, aux drones, aux émetteurs personnels et aux systèmes de suivi à grande échelle des déplacements des forces, on peut rassembler des renseignements qui fournissent des données en temps réel sur la position des unités. L’établissement des communications entre les différentes unités militaires en temps réel présente de nombreux avantages, mais comporte son lot d’enjeux.
Les avantages de la connaissance situationnelle en temps réel
Les commandants militaires prennent leurs meilleures décisions lorsqu’ils sont bien informés. La théorie tactique souligne l’importance de maintenir le rythme lors des conflits militaires. Le rythme consiste essentiellement à se déplacer au moment et de la façon qu’on le souhaite. Ce concept suppose également que l’ennemi réagit constamment à vos mouvements et non l’opposé. Afin de maintenir le rythme, les commandants doivent ainsi savoir où se trouvent leurs forces en temps réel.
Les avantages liés à la connaissance situationnelle en temps réel contribuent à maintenir le rythme. Parmi ces derniers, citons le commandement et le contrôle accrus, l’utilisation optimisée des ressources et une collecte et une analyse des données plus efficaces.
On dit que les éléments fondamentaux de l’art et la science de la guerre sont le commandement et le contrôle. Les efforts nécessaires pour atteindre les objectifs militaires seraient désorganisés et inefficaces sans une structure de commandement et de contrôle bien établie. Les dirigeants à tous les niveaux qui occupent un rôle de commandement et de contrôle ont besoin de données précises sur l’emplacement et les effectifs des troupes.
En ayant la connaissance d’une situation particulière en temps réel, le commandement et le contrôle deviennent plus aisés. Les dirigeants militaires qui connaissent l’emplacement des troupes peuvent manœuvrer plus rapidement et prendre de meilleures décisions. Lorsque de nouveaux renseignements sur les mouvements de l’ennemi sont obtenus, les forces alliées peuvent réagir plus rapidement et plus efficacement.
Outre un commandement et un contrôle accrus, la connaissance situationnelle rend l’utilisation des ressources plus efficace. Les systèmes d’appui-feu comme les canons d’artillerie représentent un bon exemple en ce sens. La plupart des pièces d’artillerie modernes sont soit autopropulsées, soit remorquées, ce qui les rend très mobiles. Si une unité se retrouve sous le feu de l’ennemi, les unités d’artillerie amies peuvent être la meilleure ressource pour supprimer l’ennemi et pour donner à l’unité sous attaque une chance de riposter.
Si les pièces d’artillerie ne sont pas suffisamment à portée pour faire feu sur l’ennemi, elles n’apporteront que peu ou pas d’aide à l’unité attaquée. Si la connaissance de la situation en temps réel a toutefois été maintenue, les commandants sauront déjà si l’artillerie peut attaquer l’ennemi ou non; ainsi, ils pourront rapidement mettre sur pied une mission de tir et alimenter le champ de tir. De même, les commandants peuvent rapidement mobiliser d’autres ressources, dont les forces d’intervention rapide (QRF), l’appui aérien et les unités de neutralisation des explosifs et munitions (NEM), mais uniquement si leurs positions sont connues avec précision.
La présence accrue de la technologie dans les scènes de combat signifie que davantage de données sont recueillies en continu. Or, ces données ne sont pas uniquement relatives aux forces alliées. Par exemple, les drones portatifs sont rapidement déployés parmi les troupes militaires regroupées en petites unités. Ces drones sont d’excellentes plateformes de collecte de données pour suivre les mouvements de l’ennemi.
Les renseignements à caractère délicat, dont l’emplacement et les déplacements de l’ennemi sont extrêmement inestimables, mais uniquement en temps réel. Plus ces renseignements deviennent désuets, moins ils sont utiles. Mais grâce à la connaissance de la situation en temps réel, les analystes et les planificateurs peuvent obtenir une idée plus précise de la taille, des capacités et de la position de l’ennemi. Munis de données précises, ils peuvent alors affronter et vaincre l’ennemi.
Les enjeux liés à la connaissance situationnelle en temps réel
Les enjeux associés à la connaissance de la situation en temps réel comprennent l’interopérabilité des appareils, la formation et la sûreté des données. Heureusement, des solutions existent pour chacun de ces enjeux en vue d’atténuer leurs possibles effets indésirables sur le maintien de la connaissance situationnelle en temps réel. Examinons ceux-ci un peu plus en détail.
Les forces militaires du monde entier adoptent le concept de soldat numérique. Auparavant, la radio de campagne constituait le lien principal qu’avaient les soldats avec la technologie. Or, cette relation a radicalement changé. Les combattants disposent désormais d’un éventail d’appareils de communication et de technologie portable, de drones et de dispositifs de suivi perfectionnés. Si ces outils peuvent augmenter la rapidité d’action et la létalité du soldat, ils présentent toutefois un enjeu en matière d’interopérabilité.
Puisque différents fabricants fournissent les technologies employées sur le champ de bataille, on ne peut garantir la synchronisation aisée de ces appareils avec d’autres dispositifs lors des conflits armés, voire leur compatibilité avec les réseaux de communication plus étendus utilisés par les forces militaires. Ce fait est particulièrement mis en lumière lorsqu’on se procure ces technologies sur le marché libre plutôt qu’auprès de fournisseurs du secteur de la défense qui conçoivent généralement leurs appareils selon les normes militaires.
Même au sein des forces militaires d’un même pays, les systèmes peuvent être incompatibles. Par ailleurs, des différends peuvent survenir lorsqu’une unité ne peut pas partager ses données avec une autre. Compte tenu du temps nécessaire aux forces armées pour acquérir de nouveaux appareils, l’intégration de solutions à ces problèmes peut prendre des mois, voire des années.
L’utilisation accrue de la technologie lors de conflits armés modernes signifie également que les soldats doivent avoir reçu la formation relative à ces dispositifs. En plus d’apprendre les aptitudes de base associées aux opérations de combat, dont la navigation terrestre et l’adresse au tir, les soldats doivent connaître les tenants et aboutissants de chaque pièce d’équipement qu’ils portent. Sans formation, la technologie peut nuire à la mission en soi.
Par exemple, la technologie dite « Blue Force Tracker » s’est avérée un multiplicateur de force d’importance en assurant la communication entre les unités dans la zone d’opérations durant mon déploiement en Irak. À un certain moment où nous nous déplacions dans un convoi, un soldat nous a donné en continu des rapports de localisation avec des grilles qui n’avaient aucun sens. C’était assez déconcertant, car le Blue Force Tracker fonctionne avec le système mondial de positionnement (GPS) et aurait dû nous fournir des grilles très précises pour notre localisation.
Après une enquête plus approfondie, il a été déterminé que le soldat n’avait pas reçu une formation appropriée quant au Blue Force Tracker et qu’il tirait les grilles d’une carte de la Corée du Sud au lieu de notre emplacement actuel en Irak. Il a ainsi été conclu que sans formation pertinente, la technologie est inutile.
La sûreté des données représente un ultime enjeu. La collecte de la grande quantité de renseignements nécessaires à l’acquisition d’une connaissance de la situation en temps réel est un aspect en soi, en assurer la sûreté en est tout autre. Certaines technologies sont conçues pour fonctionner dans un environnement à caractère délicat, où les données doivent être protégées. Les solutions grand public prêtes à l’emploi ne sont souvent pas conçues dans cette optique.
Or, il n’est pas une mince affaire de dénicher la solution optimale pour recueillir des données et de les protéger des adversaires. Fort heureusement, il existe des solutions qui facilitent la communication entre les dispositifs de qualité militaire et les produits en vente libre sans compromettre les données à caractère délicat.
Les meilleures pratiques
La capacité de suivre en temps réel le déplacement des forces amies de même que des forces ennemies est une réalité du champ de bataille moderne. Bien que la connaissance situationnelle en temps réel soit un enjeu, les avantages et l’investissement en valent la peine. Voici quelques suggestions susceptibles d’aider à atténuer les enjeux et à maximiser les bénéfices découlant de l’adoption de systèmes de suivi en temps réel des mouvements des unités.
Premièrement, veillez à ce que toutes les personnes qui utilisent la technologie de suivi sachent comment l’utiliser convenablement. Bien que chaque soldat n’ait pas à être un spécialiste, la pleine connaissance des fonctions qu’il sera appelé à exécuter est de rigueur. Chaque membre de l’équipe doit également connaître certaines techniques de dépannage liées à son rôle avec l’équipement.
En second lieu, il faut rechercher les éléments possibles de conflits d’interopérabilité et trouver des solutions qui rehaussent la compatibilité des systèmes. Bien souvent, des solutions commerciales peuvent combler les lacunes entre les appareils de différents fabricants et favoriser la connaissance situationnelle en temps réel non dégradée.
BCC-MIL utilisé par le 37e régiment de transmissions des Forces Armées Canadiennes lors de l’exercice Staged Response.
Enfin, la technologie utilisée pour localiser les unités doit être sécurisée. En outre, les unités militaires ne devraient utiliser que des systèmes en mesure d’assurer la sûreté des données. Il existe de nombreuses solutions logicielles qui assurent le suivi des déplacements des personnes et des véhicules, mais nombre d’entre elles ne sont pas sécurisées. N’utilisez que des logiciels intégrés à des dispositifs sécurisés avec lesquels l’emplacement des troupes n’est pas compromis.
La connaissance situationnelle en temps réel est cruciale pour remporter des conflits armés. Or, la technologie assure désormais le suivi des déplacements des forces amies ou ennemies comme jamais auparavant. La connaissance des enjeux liés à une situation particulière maximisera les avantages et assurera votre victoire.
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